C'est affreux parce que plus le temps passe, plus je me rends compte que ma mère me dégoûte. Ça n'est pas un sentiment anodin, et c'est pesant. Quand j'en parle, car j'ai envie d'expliquer ce dégout, je m'entends dire que je devrais aller voir un psy.
Ce qui semble vouloir dire que ça n'est pas normal, j'irais voir un psy et ma mère ne me dégouterait plus ? Ou alors je n'aurais plus autant envie d'en parler ?
Je ne sais.
Si je tente de rationaliser, je comprends plein de choses, mais ça ne change rien.
Après réflexions je crois avoir compris ce qui me semble impardonnable : l'art de faire prendre des vessies pour des lanternes. Explication : ma mère nous interdisait tout. Pas de sorties, pas de télé, pas de cinéma. Nous avions le droit à des activités extérieures (sport ou art) si on voulait (mais pas de garderie, il y avait un centre récréatif du mercredi après midi : ça, pas le droit). Interdit de jouer dans le jardin. Nous ne recevions personne (mes aprents non plus). Jamais de balades, sauf un tout petit peu en vacances. Pas de télé.
En gros, sauf sorties pour école, piano ou danse, enfermés à la maison.
Pas de gateaux, pas de desserts, exceptionnellement des pains au chocolat. Quand j'avais droit, trois fois par an, à un pain au chocolat, c'était byzance. Nous ne disions rien par peur des paires de gifles.
Plus tard il s'est avéré que ma mère ne voyait pas plein de choses, et j'ai pu lui mentir facilement. Mais il fallait donc lui mentir. A la question : est-ce que je peux m'acheter un gateau, la réponse était systématiquement non, mais quand je faisais les courses, je gardais un peu de monnaie et elle ne le voyait pas.
Nous parlions, mais elle ne voulait pas être convaincue, donc on parlait de choses et d'autres. Si je parlais d'amis, je ne devais pas évoquer les fètes, réunions, discussions à perte de vue avec un verre de vin : aimer parler avec ses amis était stérile, inutile et infantile, discuter des heures avec eux une perte de temps, et boire un verre de vin, c'était être alcoolique. Tous ces sujets devaient être évités. mes "amis" étaient des gens sympas rencontrés, mais ils ne devaient pas être vus, ni fréquentés : il fallait uniquement les voir en corus ou dans le boulot.
Au fur et à mesure, j'ai compris que c'était faux. Mais il m'a fallu du temps, tant ma mère avait d'impact sur moi. C'est cela que je ne peux lui pardonner : d'avoir été le dictateur de mes pensées pendant si longtemps. De m'avoir fait croire que les amis c'était pathologique, par exemple, obligé à me poser moi même des questions sur ma santé mentale parce que j'aimais parler à des gens qui n'étaient pas "de ma famille".
Il m'a fallu du temps pour réaliser que ma façon de percevoir les choses était normale. Qu'avoir des amis ne signifiait pas que j'étais anormale, mais que j'étais sociable. Et que si j'étais souvent en conflit avec ma mère, c'était à cause de son exécrable caractère.
C'est de cela dont il est question : se percevoir de façon droite ou erronnée. Je me suis perçue comme une personne "anormale" pendant des années à cause d'elle.
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